L’Ombre et la Plume a des projets !

L'Ombre et la Plume diversifie ses interventions en prison avec : des activités, des nouveaux établissements, des interventions en collaboration avec d'autres associations de l'EDHEC....

 

L'Ombre et la Plume diversifie ses projets de sensibilisation avec : ses podcasts, ses conférences, son projet d'intervention dans les collèges et lycées...

 

L'Ombre et la Plume est dans une recherche constante de nouveaux projets et d'évolutions !

 

Conférence à l'EDHEC

Conférence avec Mouloud Mansouri, ancien détenu et fondateur d’une association qui œuvre à la réinsertion des détenus, à l'EDHEC

 

La prise de contact avec M. Mansouri

L’Ombre et la Plume a décidé de recevoir pour sa conférence annuelle M. Mouloud Mansouri. Une vidéo du média « Brut », présent sur les réseaux sociaux, nous avait interpellés : M. Mansouri y était présenté, lui et ses projets, à travers une courte vidéo. L’Ombre et la Plume l’a donc contacté, pour lui proposer de venir témoigner à l’EDHEC. La prise de contact fut rapide et efficace, M. Mansouri était attendu pour le 22 mars à l’EDHEC

 

Le parcours de M. Mansouri 

Mouloud Mansouri a passé dix années dans différentes prisons. A sa sortie, il a utilisé son réseau pour fonder l’association Fu-jo, et plus précisément la « shtar academy » pour favoriser la réinsertion des détenus par la musique. Il a ainsi fait intervenir des rappeurs en prison, afin d’écrire des textes et sortir des albums. Au cours de la conférence, il a pu donc nous détailler son ressenti, son parcours et ses ambitions. 

 

Le déroulé de la Conférence

M. Mansouri nous a tout d’abord raconté son enfance à Hyères, où il vivait bien sans pour autant avoir autant de moyens que ses camarades. Il nous précise qu’il ne comprenait pas pourquoi il avait moins que les autres, et son désir d’avoir autant. Il tombe ainsi dans le trafic de drogue pour augmenter ses revenus. Il tombe à dix-huit ans pour trafic de stupéfiants. Il fait différentes prisons, sort et entre à nouveau en prison plusieurs fois. Il explique : « Nous étions à quatre dans des cellules, voire parfois six. Il y avait des cafards, les conditions de vie étaient affreuses.  La prison, c’est l’école du crime. C’est cliché de dire ça mais c’est la réalité. Quand je suis rentré en prison je n’avais jamais touché une arme de ma vie et en sortant j’avais une kalachnikov sur moi ». Il explique aussi qu’il avait toujours eu une appétence particulière pour la musique, et que cela s’est accentué en prison : il a donc longuement négocié avec les surveillants pour pouvoir faire entrer des instruments et organiser des concerts durant sa détention. Pour lui, « vingt et une heures de cellule par jour, c’est comme mettre un homme dans une cage sans manger, alors il devient féroce. Il a besoin de nourriture pour ressortir tout doux. Dans la prison, la nourriture c’est l’éducation, le sport et la culture. Sans ça, les détenus récidivent. Malheureusement, les détenus n’ont pas accès à tout cela ». 

A sa sortie définitive, sa mentalité a changé : il va concrétiser un projet de musique en prison. Il nous parle de la difficile réinsertion des détenus dans le monde professionnel, puisqu’ils ne sont pas accompagnés. 

Il nous parle ensuite de son association, de la façon dont il a pu contacter les rappeurs, concrétiser son projet, s’organiser avec les surveillants pénitentiaires. Certains directeurs de prisons ont été plus conciliants que d’autres. Il a ainsi sorti un premier album, écrit par des détenus avec des rappeurs, et va en sortir un second. Il nous fait même écouter un extrait. Il aimerait réaliser un projet avec des femmes en prison. Pour lui, les rappeurs acceptent globalement facilement de faire des concerts bénévolement dans les prisons parce que c’est leur culture, il ne faut pas qu’ils oublient d’où ils viennent et par où ils sont passés.

A chaque fois qu’il retourne en prison, cela lui prend toute son énergie. Au début, cela lui a fait bizarre d’entendre à nouveau les bruits et ressentir des odeurs qu’il connaissait, mais pour lui c’est devenu normal, il sent qu’il doit le faire, qu’il doit mener ce projet.

Il nous parle enfin de son avis sur la politique carcérale en France. Pour lui les hommes politiques ignorent complètement la réalité carcérale, tout est de l’ordre de l’improvisation. Il pensait qu’il y aurait des changements avec le nouveau ministère de la justice mais en fait rien n’a changé. L’abandon de ces milieux ne fait que reproduire le crime. 

 

L’Ombre et la Plume a donc pu ainsi offrir une conférence riche et percutante aux étudiants de l’EDHEC, afin de sensibiliser à nouveau au monde carcéral et à ses difficultés. Tous nos remerciements vont à M. Mansouri pour son temps et son implication, au pôle « sensibilisation » de l’association qui a organisé ce moment d’échange ainsi qu’à l’EDHEC qui nous a permis d'organiser la conférence sur le campus. 

Conférence Marc Sluse à l'EDHEC

Un homme qui aide les autres à s’évader et qui s’évade lui-même par la lecture.

 

Lors d'une conférence très poignante, Marc Sluse a su tenir en haleine son auditoire. Cet homme hors du commun nous a livré le témoignage de sa vie avant de vivre un temps d'échange avec l'auditoire et de répondre à différentes questions. 

 

Son enfance

Pour comprendre qui est Marcus, il est indispensable de se plonger dans son enfance. Une enfance douloureuse qui a façonné l’homme qu’il est aujourd’hui.

 

Né en 1955 en Belgique, Marcus passe la majeure partie de son enfance dans un orphelinat. Il rencontre de nombreux couples mais aucune des démarches d’adoption n’aboutit. L’espoir de vivre dans une famille s’évanouit à chaque fois. Ces évènements le plongent dans un immense sentiment d’abandon.

 

Finalement, alors qu’il n’y croit plus, un couple l’adopte enfin. Commence alors pour lui une nouvelle vie. Il passe de l’enfer au paradis. Il voyage à travers l’Europe avec sa nouvelle famille.

 

Cette vie va s’interrompre brutalement. A 13 ans, il traverse une période difficile de remise en question. Il décide de s’enfuir et rejoint l’orphelinat où il a grandi. Mauvaise nouvelle : il n’y a plus de place… C’est donc dans un home pour délinquant qu’il est envoyé. Le calvaire recommence. Cette fois, il est maltraité et même battu par le directeur.

 

A l’école, il parle de son envie de suicide lors d’une expression écrite et est alors renvoyé du home dans lequel il vit. Il est alors privé de la seule chose à laquelle il tient : l’enseignement. 

 

Ses premières condamnations 

Un jour, Marcus récupère et revend les meubles de l’un de ses amis qui voulait les jeter. Ce dernier l’accuse de vol. Marcus vit alors son premier séjour en prison.

 

A sa sortie, Marcus se retrouve terriblement seul. Il n’a nulle part où aller et n’a aucun ami qui l’attend à l’extérieur. Les seules relations qu’il a sont avec les autres détenus. Lors de son séjour en prison, il a côtoyé des criminels qui lui ont appris les techniques pour gagner facilement de l’argent.

 

Il sombre alors dans la délinquance et tombe dans un cercle vicieux de plus de 20 ans.

 

Quelle vie en prison ?

La journée typique d’un prisonnier est extrêmement vide. Les gardiens les réveillent à 6h15 pour vérifier qu’ils ne sont pas morts suicidés pendant la nuit. Deux heures de promenades viennent rythmer leur journée. Le reste du temps, ils n’ont rien à faire.

 

Marcus se réfugie dans la lecture. Comme il ne peut pas s’évader physiquement, les livres lui permettent de s’évader dans un autre univers, celui de la fiction. Pour passer le temps, il apprend par cœur le dictionnaire.

 

Les évasions les plus marquantes

Un jour, on l’appelle pour solliciter son aide. Deux hommes extrêmement recherchés qui se sont évadés de prison en hélicoptère ont besoin d’être cachés et ont entendu parler de lui. Lorsque Marcus les reconnait, ces derniers prennent peur et veulent le prendre comme otage avant de comprendre que c’est inutile : Marcus est prêt à les aider de son plein gré.

 

Une autre fois, alors que Marcus est en prison, un détenu lui demande de l’aider à s’évader. Le plan est le suivant : lors de la promenade, Marcus lui donne un coup de poing, le détenu tombe et est emmené à l’hôpital où un ami l’attend à moto. Tout se passe comme prévu jusqu’au moment où il doit courir pour rejoindre son ami. Pour faire plus vrai, le détenu avait pris des médicaments le matin même, si bien qu’il est incapable de courir assez vite. De retour en prison, il dénonce Marcus.

 

Prison et société

Selon Marcus, la prison souffre d’un grand manque d’humanité et infantilise les hommes. Elle gère toute leur vie. Ce qui fait souffrir Marcus, c’est l’ostracisme qu’il vit. Même son frère l’a abandonné et le renie.

 

De plus, les détenus ne sortent pas meilleurs de la prison. Au contraire : à 3 dans 9m2, c’est impossible de bâtir un avenir.  Par ailleurs, beaucoup n’ont rien hors de la prison. Il n’est pas rare qu’un détenu se suicide à quelques jours de sa libération car rien ne l’attend à l’extérieur.

 

Un jour, Marcus a lui-même pensé au suicide après un film qui l’a bouleversé. En revenant dans sa cellule où il devait passer encore de longues années, il décide de passer à l’acte. A ce moment même, la porte de sa cellule s’ouvre : le Pasteur vient voir ce qu’il a pensé du film. Il luit dit alors que sa vie ne lui appartient pas. et que même les chiens ne se suicident pas. Cela achève de convaincre Marcus.

 

Lorsqu’on demande à Marcus s’il a vécu des moments joyeux en prison, il nous répond qu’il en voit un seul : le jour où il a réussi à corrompre un gardien pour qu’il lui apporte une bouteille de vodka…

 

Le sens de sa vie

Selon Marcus, aider les détenus ce n’est pas cautionner ce qu’ils ont fait. Il est persuadé que c’est le sens de sa vie. Les prisonniers lui rappellent les orphelins avec qui il a grandi. Il est même prêt à sacrifier sa vie personnelle et sa liberté pour les aider. Aujourd’hui encore si on l’appelait, il viendrait. Cela n’a rien d’héroïque pour lui. Il ne fait que son devoir.

 

Un jour à 50 ans, on lui propose de s’investir dans une association. Faire des randonnées avec des personnes à mobilité réduite. Ces personnes vont beaucoup l’aider à vivre hors de la prison.  C’est avec deux membres de l’association qu’il est venu aujourd’hui.

 

Raconter ainsi son témoignage est loin d’être une partie de plaisir pour Marcus. En effet, cela fait remonter des souvenirs qu’il préfèrerait oublier. A chaque fois qu’il témoigne, il ne peut pas trouver le sommeil durant plusieurs jours.

 

En résumé : une conférence touchante et très intéressante qui lève le voile sur le milieu carcéral et ses enjeux.  

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Interview d'un détenu mineur dans le Journal des Grandes Ecoles

Nous sommes fiers de vous annoncer la publication d'un article dans le N°85 du Journal des Grandes Ecoles à propos de notre association, centré autour de l'interview réalisée auprès d'un des détenus que nous rencontrons régulièrement.

 

Bonne lecture ! 

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Objectif atteint pour la campagne de Crowdfunding !

Notre campagne de Crowdfunding s'est terminée hier soir : c'est un succès puisque grâce à vous nous avons dépassé notre objectif de 2 000€. Nous vous adressons donc un grand MERCI pour votre soutien ! Nous allons pouvoir financer la prochaine édition du Livret de Sortie et permettre à de nombreux détenus mineurs de bénéficier de cet outil simple pour retrouver ses repères en sortant de prison.

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Intervention spéciale - Journée Santé à l'EPM

Cette intervention était organisée en partenariat avec d’autres associations bénévoles dans le but de sensibiliser les jeunes détenus aux risques liés à une mauvaise alimentation ainsi qu’à la consommation d’alcool et de stupéfiants. Tom, Hugo, Alexis, Chloé et Quentin se sont rendus dans le gymnase de l’EPM pour monter un stand smoothie, de fraise kiwi à orange banane, que les détenus venaient goûter à l’issue de leur exercice physique. Nous avons reçu la visite de la directrice de la SPIP du Nord.

Les détenus étaient contents de pouvoir les goûter et nous ont dit apprécié le format de cette journée « qui change de l’ordinaire » avec en toile de fond une vraie réflexion sur les voies et moyens pour adopter une vie plus saine. A 15h, le dernier groupe de détenus ayant quitté le gymnase, nous en avons profité pour ranger et parcourir les différents stands à notre tour. Nous avons remercié Amar pour l’organisation de toute cette journée et plus largement sur le parfait déroulement des interventions de l’année. Nous sommes ensuite rentrés quelque peu nostalgiques avec l’achèvement de cette belle année.

 

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Intervention PDC

Aujourd'hui c'est journée cinéma pour les détenus de l'EPM de Quiévrechain !

C’est une intervention spéciale puisque Chloé et Matthieu de l'Ombre et la Plume sont accompagnés de Cloé et Jeanne, membres de Prix de Court, l'association organisatrice du Festival Européen du Cinéma, un festival lillois autour du court métrage. L’idée est de leur projeter trois courts-métrages, souvent très engagés, pour ensuite débattre avec eux sur les messages délivrés.

 

Le premier court métrage met en scène une jeune fille voilée de cité qui se voit pervertie par une « blonde délurée » anciennement abusée par son père. Wow. L’air grave, l’ambiance presque pesante, nous tentons de nous la jouer critique ciné pour apaiser le tout.

 

C’est avec le deuxième court-métrage, « Noyade interdite » que nos chers détenus vont se lâcher. Alors qu’on entre dans un monde où tout serait achetable en pièces, de la femme objet sexuel à l’eau de sa douche, le groupe reste malgré tout rigolard et même turbulent. Les premières minutes dévoilant une scène quelque peu Olé Olé, on ne les arrête plus. Peut-être est-ce grâce à cette subtile entrée en matière qu’on aboutit finalement à un échange plutôt intéressant : ils évoquent leurs rêves d’enfants, encore jamais réalisés. Militaire pour l’un, footballeur pour l’autre, c'est un moment très touchant.

 

 

On conclut cette intervention par un échange avec l’éducateur qui nous félicite pour cette idée et nous invite à la renouveler prochainement (il faut dire qu’il aime aussi prendre part à nos intervention, communiquant sa motivation pour les débats à nos détenus).

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S'évader avec Laurent Jacqua le temps d'une conférence

L'Ombre et la Plume a reçu Laurent Jacqua à l'EDHEC pour une conférence extraordinaire : durant une heure très intense il a pu partager son parcours et son avis sur l'état du système carcéral français avec les étudiants. Un témoignage à la fois drôle et enrichissant !

Nous sommes lundi 12 février, il est 12h et les étudiants remplissent peu à peu l'amphi VIP. Une fois tous installés, notre curiosité ayant laissé place au silence, la conférence peut commencer.

Laurent Jacqua, ancien détenu au parcours carcéral agité et semé de multiples évasions, commence par introduire l'état actuel du système carcéral. C'est un sujet toujours d'actualité puisque les mesures prises par le gouvernement se multiplient. C'est d'ailleurs l'occasion pour lui de nous donner son premier avis : "créer une unité spécialement pour les terroristes, c'est stupide. Enfermez deux fans de pêche ensemble, et devinez : de quoi parleront-ils ? De pêche. Ici c'est la même chose, le phénomène ne fera que s'amplifier, c'est d'ailleurs comme ça que s'est progressivement créé Daesh".

Les premières années à Fleury Merogis

Il nous explique ensuite en quoi le premier pas que vous faites dans une prison vous change à jamais. En 1985, alors âgé de 18 ans, il intègre la plus grande prison d'Europe : la maison d'arrêt de Fleury Merogis. Et c'est là que tout s'accélère : à peine entré des ces grands bâtiments, on lui ôte tous ses vêtements sous les yeux de 3 gardes et on lui attribue un numéro d'écrou dont il se souviendra toute sa vie : "138496Q". Le phénomène de déshumanisation et d'humiliation commence alors sa métamorphose.

Celle-ci se poursuit lorsqu'il découvre la celle "individuelle" qu'il doit partager avec un autre détenu, dans laquelle il dormira par terre durant 6 mois. Mais dès sa première journée il n'est pas au bout de ses surprises : les sorties en balade consistent à sa faire tabasser et à lui faire comprendre que pour survivre ici, il faudra être le plus violent. C'est d'ailleurs cette spirale de violence qui justifie selon lui les 60% de récidive en France : c'est un engrenage.

Ce cercle vicieux le pousse à penser que "si on le traite comme un chien, alors il sera le chien le plus féroce". Il n'a alors plus qu'un seul objectif en tête : s'évader. Il s'attarde ainsi à nous raconter une de ses multiples évasions : il réussit à faire rentrer des armes dans sa cellule, trafique son ampoule pour feindre une panne d'électricité et une fois les "matons" entrés dans sa cellule, son co-détenu et lui-même leur sautent à la gorge et c'est ainsi que s'enchaînent prises d'otages et cavales.


La lecture pour s'évader

Le problème est qu’à chaque évasion, il ne récupère pas sa liberté, mais s’en éloigne un peu plus. Ses cavales se font de plus en plus violentes, rythmées par des braquages incessants pour survivre, et des retours en prison. Ce sont finalement ces 5 ans passés en isolement, dans le noir, avec un rat pour seul et unique contact, qui le font réagir. C’est grâce à l’intervention d’un professeur de philosophie de l’université Paris VII qu’il découvre que sa véritable évasion débutera bel et bien entre ces 4 murs : grâce à l’écriture.

Les choses s’accélèrent : il découvre Tolstoï, Céline,… et décide que c’est à son tour de s’exprimer. Il réussit alors à tenir illégalement le premier blog d’un prisonnier et sa révolte va vite se diffuser : "Je ne dors plus, je ne mange plus, je meurs, j’agonise et je n’ai plus de force, de résistance. […] Personne ne s’inquiète, je meurs en cellule seul comme un chien". En effet, il raconte son histoire, celle d’un homme qui découvre la violence inévitable en prison et qu’on laisse mourir à petit feu.

C’est ainsi qu’après une vingtaine d’années de détention commence sa plus belle évasion : en 2002, il publie son premier livre La guillotine carcérale, silence on meurt [Extrait], il obtient un DAEU littéraire, donne naissance à un « bébé parloir », co-écrit un titre aux côtés de Grand Corps Malade ; tout un parcours qui lui vaudra une libération conditionnelle (et définitive) en 2010.

A ce stade de la conférence, on comprend bien que survivre en prison n’est pas chose facile. Quelle est donc notre surprise lorsque on l’entend dire qu’ il est "contre toute forme d’amélioration du confort en prison". En effet, sa conclusion est la suivante : lorsque suite aux émeutes de 1980 le gouvernement a introduit la télévision dans les cellules, ils pensaient améliorer le confort, mais ils n’ont fait qu’endormir le réel problème qui est le manque de suivi, de soutien et surtout de culture en prison car selon lui : "l'ignorance est "le pire crime contre l'humanité"". Il souhaite que l’Etat arrête d’enfermer les "petits délinquants", mineurs tombés dans le traffic, et qu’il installe des mesures solides de réinsertion pour ces jeunes qui ont toutes leurs chances de retourner dans le droit chemin.

C’est avec une certaine émotion que Laurent Jacqua termine son récit et laisse place aux multiples questions qu’il a éveillées chez de nombreux étudiants. Après une heure de conférence, les paroles du titre Le bout du tunnel prennent alors tout leur sens :

 

"Avant je m’évadais au pistolet,

Maintenant je m’évade à l’épistolaire"

 

Vous pouvez retrouver des extraits du live de la conférence sur notre Facebook ou bien en apprendre plus sur Laurent Jacqua dans cette vidéo.

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Conférence à l'EDHEC

Conférence avec Mouloud Mansouri, ancien détenu et fondateur d’une association qui œuvre à la réinsertion des détenus, à l'EDHEC

 

La prise de contact avec M. Mansouri

L’Ombre et la Plume a décidé de recevoir pour sa conférence annuelle M. Mouloud Mansouri. Une vidéo du média « Brut », présent sur les réseaux sociaux, nous avait interpellés : M. Mansouri y était présenté, lui et ses projets, à travers une courte vidéo. L’Ombre et la Plume l’a donc contacté, pour lui proposer de venir témoigner à l’EDHEC. La prise de contact fut rapide et efficace, M. Mansouri était attendu pour le 22 mars à l’EDHEC

 

Le parcours de M. Mansouri 

Mouloud Mansouri a passé dix années dans différentes prisons. A sa sortie, il a utilisé son réseau pour fonder l’association Fu-jo, et plus précisément la « shtar academy » pour favoriser la réinsertion des détenus par la musique. Il a ainsi fait intervenir des rappeurs en prison, afin d’écrire des textes et sortir des albums. Au cours de la conférence, il a pu donc nous détailler son ressenti, son parcours et ses ambitions. 

 

Le déroulé de la Conférence

M. Mansouri nous a tout d’abord raconté son enfance à Hyères, où il vivait bien sans pour autant avoir autant de moyens que ses camarades. Il nous précise qu’il ne comprenait pas pourquoi il avait moins que les autres, et son désir d’avoir autant. Il tombe ainsi dans le trafic de drogue pour augmenter ses revenus. Il tombe à dix-huit ans pour trafic de stupéfiants. Il fait différentes prisons, sort et entre à nouveau en prison plusieurs fois. Il explique : « Nous étions à quatre dans des cellules, voire parfois six. Il y avait des cafards, les conditions de vie étaient affreuses.  La prison, c’est l’école du crime. C’est cliché de dire ça mais c’est la réalité. Quand je suis rentré en prison je n’avais jamais touché une arme de ma vie et en sortant j’avais une kalachnikov sur moi ». Il explique aussi qu’il avait toujours eu une appétence particulière pour la musique, et que cela s’est accentué en prison : il a donc longuement négocié avec les surveillants pour pouvoir faire entrer des instruments et organiser des concerts durant sa détention. Pour lui, « vingt et une heures de cellule par jour, c’est comme mettre un homme dans une cage sans manger, alors il devient féroce. Il a besoin de nourriture pour ressortir tout doux. Dans la prison, la nourriture c’est l’éducation, le sport et la culture. Sans ça, les détenus récidivent. Malheureusement, les détenus n’ont pas accès à tout cela ». 

A sa sortie définitive, sa mentalité a changé : il va concrétiser un projet de musique en prison. Il nous parle de la difficile réinsertion des détenus dans le monde professionnel, puisqu’ils ne sont pas accompagnés. 

Il nous parle ensuite de son association, de la façon dont il a pu contacter les rappeurs, concrétiser son projet, s’organiser avec les surveillants pénitentiaires. Certains directeurs de prisons ont été plus conciliants que d’autres. Il a ainsi sorti un premier album, écrit par des détenus avec des rappeurs, et va en sortir un second. Il nous fait même écouter un extrait. Il aimerait réaliser un projet avec des femmes en prison. Pour lui, les rappeurs acceptent globalement facilement de faire des concerts bénévolement dans les prisons parce que c’est leur culture, il ne faut pas qu’ils oublient d’où ils viennent et par où ils sont passés.

A chaque fois qu’il retourne en prison, cela lui prend toute son énergie. Au début, cela lui a fait bizarre d’entendre à nouveau les bruits et ressentir des odeurs qu’il connaissait, mais pour lui c’est devenu normal, il sent qu’il doit le faire, qu’il doit mener ce projet.

Il nous parle enfin de son avis sur la politique carcérale en France. Pour lui les hommes politiques ignorent complètement la réalité carcérale, tout est de l’ordre de l’improvisation. Il pensait qu’il y aurait des changements avec le nouveau ministère de la justice mais en fait rien n’a changé. L’abandon de ces milieux ne fait que reproduire le crime. 

 

L’Ombre et la Plume a donc pu ainsi offrir une conférence riche et percutante aux étudiants de l’EDHEC, afin de sensibiliser à nouveau au monde carcéral et à ses difficultés. Tous nos remerciements vont à M. Mansouri pour son temps et son implication, au pôle « sensibilisation » de l’association qui a organisé ce moment d’échange ainsi qu’à l’EDHEC qui nous a permis d'organiser la conférence sur le campus. 

Conférence Marc Sluse à l'EDHEC

Un homme qui aide les autres à s’évader et qui s’évade lui-même par la lecture.

 

Lors d'une conférence très poignante, Marc Sluse a su tenir en haleine son auditoire. Cet homme hors du commun nous a livré le témoignage de sa vie avant de vivre un temps d'échange avec l'auditoire et de répondre à différentes questions. 

 

Son enfance

Pour comprendre qui est Marcus, il est indispensable de se plonger dans son enfance. Une enfance douloureuse qui a façonné l’homme qu’il est aujourd’hui.

 

Né en 1955 en Belgique, Marcus passe la majeure partie de son enfance dans un orphelinat. Il rencontre de nombreux couples mais aucune des démarches d’adoption n’aboutit. L’espoir de vivre dans une famille s’évanouit à chaque fois. Ces évènements le plongent dans un immense sentiment d’abandon.

 

Finalement, alors qu’il n’y croit plus, un couple l’adopte enfin. Commence alors pour lui une nouvelle vie. Il passe de l’enfer au paradis. Il voyage à travers l’Europe avec sa nouvelle famille.

 

Cette vie va s’interrompre brutalement. A 13 ans, il traverse une période difficile de remise en question. Il décide de s’enfuir et rejoint l’orphelinat où il a grandi. Mauvaise nouvelle : il n’y a plus de place… C’est donc dans un home pour délinquant qu’il est envoyé. Le calvaire recommence. Cette fois, il est maltraité et même battu par le directeur.

 

A l’école, il parle de son envie de suicide lors d’une expression écrite et est alors renvoyé du home dans lequel il vit. Il est alors privé de la seule chose à laquelle il tient : l’enseignement. 

 

Ses premières condamnations 

Un jour, Marcus récupère et revend les meubles de l’un de ses amis qui voulait les jeter. Ce dernier l’accuse de vol. Marcus vit alors son premier séjour en prison.

 

A sa sortie, Marcus se retrouve terriblement seul. Il n’a nulle part où aller et n’a aucun ami qui l’attend à l’extérieur. Les seules relations qu’il a sont avec les autres détenus. Lors de son séjour en prison, il a côtoyé des criminels qui lui ont appris les techniques pour gagner facilement de l’argent.

 

Il sombre alors dans la délinquance et tombe dans un cercle vicieux de plus de 20 ans.

 

Quelle vie en prison ?

La journée typique d’un prisonnier est extrêmement vide. Les gardiens les réveillent à 6h15 pour vérifier qu’ils ne sont pas morts suicidés pendant la nuit. Deux heures de promenades viennent rythmer leur journée. Le reste du temps, ils n’ont rien à faire.

 

Marcus se réfugie dans la lecture. Comme il ne peut pas s’évader physiquement, les livres lui permettent de s’évader dans un autre univers, celui de la fiction. Pour passer le temps, il apprend par cœur le dictionnaire.

 

Les évasions les plus marquantes

Un jour, on l’appelle pour solliciter son aide. Deux hommes extrêmement recherchés qui se sont évadés de prison en hélicoptère ont besoin d’être cachés et ont entendu parler de lui. Lorsque Marcus les reconnait, ces derniers prennent peur et veulent le prendre comme otage avant de comprendre que c’est inutile : Marcus est prêt à les aider de son plein gré.

 

Une autre fois, alors que Marcus est en prison, un détenu lui demande de l’aider à s’évader. Le plan est le suivant : lors de la promenade, Marcus lui donne un coup de poing, le détenu tombe et est emmené à l’hôpital où un ami l’attend à moto. Tout se passe comme prévu jusqu’au moment où il doit courir pour rejoindre son ami. Pour faire plus vrai, le détenu avait pris des médicaments le matin même, si bien qu’il est incapable de courir assez vite. De retour en prison, il dénonce Marcus.

 

Prison et société

Selon Marcus, la prison souffre d’un grand manque d’humanité et infantilise les hommes. Elle gère toute leur vie. Ce qui fait souffrir Marcus, c’est l’ostracisme qu’il vit. Même son frère l’a abandonné et le renie.

 

De plus, les détenus ne sortent pas meilleurs de la prison. Au contraire : à 3 dans 9m2, c’est impossible de bâtir un avenir.  Par ailleurs, beaucoup n’ont rien hors de la prison. Il n’est pas rare qu’un détenu se suicide à quelques jours de sa libération car rien ne l’attend à l’extérieur.

 

Un jour, Marcus a lui-même pensé au suicide après un film qui l’a bouleversé. En revenant dans sa cellule où il devait passer encore de longues années, il décide de passer à l’acte. A ce moment même, la porte de sa cellule s’ouvre : le Pasteur vient voir ce qu’il a pensé du film. Il luit dit alors que sa vie ne lui appartient pas. et que même les chiens ne se suicident pas. Cela achève de convaincre Marcus.

 

Lorsqu’on demande à Marcus s’il a vécu des moments joyeux en prison, il nous répond qu’il en voit un seul : le jour où il a réussi à corrompre un gardien pour qu’il lui apporte une bouteille de vodka…

 

Le sens de sa vie

Selon Marcus, aider les détenus ce n’est pas cautionner ce qu’ils ont fait. Il est persuadé que c’est le sens de sa vie. Les prisonniers lui rappellent les orphelins avec qui il a grandi. Il est même prêt à sacrifier sa vie personnelle et sa liberté pour les aider. Aujourd’hui encore si on l’appelait, il viendrait. Cela n’a rien d’héroïque pour lui. Il ne fait que son devoir.

 

Un jour à 50 ans, on lui propose de s’investir dans une association. Faire des randonnées avec des personnes à mobilité réduite. Ces personnes vont beaucoup l’aider à vivre hors de la prison.  C’est avec deux membres de l’association qu’il est venu aujourd’hui.

 

Raconter ainsi son témoignage est loin d’être une partie de plaisir pour Marcus. En effet, cela fait remonter des souvenirs qu’il préfèrerait oublier. A chaque fois qu’il témoigne, il ne peut pas trouver le sommeil durant plusieurs jours.

 

En résumé : une conférence touchante et très intéressante qui lève le voile sur le milieu carcéral et ses enjeux.  

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Interview d'un détenu mineur dans le Journal des Grandes Ecoles

Nous sommes fiers de vous annoncer la publication d'un article dans le N°85 du Journal des Grandes Ecoles à propos de notre association, centré autour de l'interview réalisée auprès d'un des détenus que nous rencontrons régulièrement.

 

Bonne lecture ! 

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Objectif atteint pour la campagne de Crowdfunding !

Notre campagne de Crowdfunding s'est terminée hier soir : c'est un succès puisque grâce à vous nous avons dépassé notre objectif de 2 000€. Nous vous adressons donc un grand MERCI pour votre soutien ! Nous allons pouvoir financer la prochaine édition du Livret de Sortie et permettre à de nombreux détenus mineurs de bénéficier de cet outil simple pour retrouver ses repères en sortant de prison.

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Intervention spéciale - Journée Santé à l'EPM

Cette intervention était organisée en partenariat avec d’autres associations bénévoles dans le but de sensibiliser les jeunes détenus aux risques liés à une mauvaise alimentation ainsi qu’à la consommation d’alcool et de stupéfiants. Tom, Hugo, Alexis, Chloé et Quentin se sont rendus dans le gymnase de l’EPM pour monter un stand smoothie, de fraise kiwi à orange banane, que les détenus venaient goûter à l’issue de leur exercice physique. Nous avons reçu la visite de la directrice de la SPIP du Nord.

Les détenus étaient contents de pouvoir les goûter et nous ont dit apprécié le format de cette journée « qui change de l’ordinaire » avec en toile de fond une vraie réflexion sur les voies et moyens pour adopter une vie plus saine. A 15h, le dernier groupe de détenus ayant quitté le gymnase, nous en avons profité pour ranger et parcourir les différents stands à notre tour. Nous avons remercié Amar pour l’organisation de toute cette journée et plus largement sur le parfait déroulement des interventions de l’année. Nous sommes ensuite rentrés quelque peu nostalgiques avec l’achèvement de cette belle année.

 

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Intervention PDC

Aujourd'hui c'est journée cinéma pour les détenus de l'EPM de Quiévrechain !

C’est une intervention spéciale puisque Chloé et Matthieu de l'Ombre et la Plume sont accompagnés de Cloé et Jeanne, membres de Prix de Court, l'association organisatrice du Festival Européen du Cinéma, un festival lillois autour du court métrage. L’idée est de leur projeter trois courts-métrages, souvent très engagés, pour ensuite débattre avec eux sur les messages délivrés.

 

Le premier court métrage met en scène une jeune fille voilée de cité qui se voit pervertie par une « blonde délurée » anciennement abusée par son père. Wow. L’air grave, l’ambiance presque pesante, nous tentons de nous la jouer critique ciné pour apaiser le tout.

 

C’est avec le deuxième court-métrage, « Noyade interdite » que nos chers détenus vont se lâcher. Alors qu’on entre dans un monde où tout serait achetable en pièces, de la femme objet sexuel à l’eau de sa douche, le groupe reste malgré tout rigolard et même turbulent. Les premières minutes dévoilant une scène quelque peu Olé Olé, on ne les arrête plus. Peut-être est-ce grâce à cette subtile entrée en matière qu’on aboutit finalement à un échange plutôt intéressant : ils évoquent leurs rêves d’enfants, encore jamais réalisés. Militaire pour l’un, footballeur pour l’autre, c'est un moment très touchant.

 

 

On conclut cette intervention par un échange avec l’éducateur qui nous félicite pour cette idée et nous invite à la renouveler prochainement (il faut dire qu’il aime aussi prendre part à nos intervention, communiquant sa motivation pour les débats à nos détenus).

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S'évader avec Laurent Jacqua le temps d'une conférence

L'Ombre et la Plume a reçu Laurent Jacqua à l'EDHEC pour une conférence extraordinaire : durant une heure très intense il a pu partager son parcours et son avis sur l'état du système carcéral français avec les étudiants. Un témoignage à la fois drôle et enrichissant !

Nous sommes lundi 12 février, il est 12h et les étudiants remplissent peu à peu l'amphi VIP. Une fois tous installés, notre curiosité ayant laissé place au silence, la conférence peut commencer.

Laurent Jacqua, ancien détenu au parcours carcéral agité et semé de multiples évasions, commence par introduire l'état actuel du système carcéral. C'est un sujet toujours d'actualité puisque les mesures prises par le gouvernement se multiplient. C'est d'ailleurs l'occasion pour lui de nous donner son premier avis : "créer une unité spécialement pour les terroristes, c'est stupide. Enfermez deux fans de pêche ensemble, et devinez : de quoi parleront-ils ? De pêche. Ici c'est la même chose, le phénomène ne fera que s'amplifier, c'est d'ailleurs comme ça que s'est progressivement créé Daesh".

Les premières années à Fleury Merogis

Il nous explique ensuite en quoi le premier pas que vous faites dans une prison vous change à jamais. En 1985, alors âgé de 18 ans, il intègre la plus grande prison d'Europe : la maison d'arrêt de Fleury Merogis. Et c'est là que tout s'accélère : à peine entré des ces grands bâtiments, on lui ôte tous ses vêtements sous les yeux de 3 gardes et on lui attribue un numéro d'écrou dont il se souviendra toute sa vie : "138496Q". Le phénomène de déshumanisation et d'humiliation commence alors sa métamorphose.

Celle-ci se poursuit lorsqu'il découvre la celle "individuelle" qu'il doit partager avec un autre détenu, dans laquelle il dormira par terre durant 6 mois. Mais dès sa première journée il n'est pas au bout de ses surprises : les sorties en balade consistent à sa faire tabasser et à lui faire comprendre que pour survivre ici, il faudra être le plus violent. C'est d'ailleurs cette spirale de violence qui justifie selon lui les 60% de récidive en France : c'est un engrenage.

Ce cercle vicieux le pousse à penser que "si on le traite comme un chien, alors il sera le chien le plus féroce". Il n'a alors plus qu'un seul objectif en tête : s'évader. Il s'attarde ainsi à nous raconter une de ses multiples évasions : il réussit à faire rentrer des armes dans sa cellule, trafique son ampoule pour feindre une panne d'électricité et une fois les "matons" entrés dans sa cellule, son co-détenu et lui-même leur sautent à la gorge et c'est ainsi que s'enchaînent prises d'otages et cavales.


La lecture pour s'évader

Le problème est qu’à chaque évasion, il ne récupère pas sa liberté, mais s’en éloigne un peu plus. Ses cavales se font de plus en plus violentes, rythmées par des braquages incessants pour survivre, et des retours en prison. Ce sont finalement ces 5 ans passés en isolement, dans le noir, avec un rat pour seul et unique contact, qui le font réagir. C’est grâce à l’intervention d’un professeur de philosophie de l’université Paris VII qu’il découvre que sa véritable évasion débutera bel et bien entre ces 4 murs : grâce à l’écriture.

Les choses s’accélèrent : il découvre Tolstoï, Céline,… et décide que c’est à son tour de s’exprimer. Il réussit alors à tenir illégalement le premier blog d’un prisonnier et sa révolte va vite se diffuser : "Je ne dors plus, je ne mange plus, je meurs, j’agonise et je n’ai plus de force, de résistance. […] Personne ne s’inquiète, je meurs en cellule seul comme un chien". En effet, il raconte son histoire, celle d’un homme qui découvre la violence inévitable en prison et qu’on laisse mourir à petit feu.

C’est ainsi qu’après une vingtaine d’années de détention commence sa plus belle évasion : en 2002, il publie son premier livre La guillotine carcérale, silence on meurt [Extrait], il obtient un DAEU littéraire, donne naissance à un « bébé parloir », co-écrit un titre aux côtés de Grand Corps Malade ; tout un parcours qui lui vaudra une libération conditionnelle (et définitive) en 2010.

A ce stade de la conférence, on comprend bien que survivre en prison n’est pas chose facile. Quelle est donc notre surprise lorsque on l’entend dire qu’ il est "contre toute forme d’amélioration du confort en prison". En effet, sa conclusion est la suivante : lorsque suite aux émeutes de 1980 le gouvernement a introduit la télévision dans les cellules, ils pensaient améliorer le confort, mais ils n’ont fait qu’endormir le réel problème qui est le manque de suivi, de soutien et surtout de culture en prison car selon lui : "l'ignorance est "le pire crime contre l'humanité"". Il souhaite que l’Etat arrête d’enfermer les "petits délinquants", mineurs tombés dans le traffic, et qu’il installe des mesures solides de réinsertion pour ces jeunes qui ont toutes leurs chances de retourner dans le droit chemin.

C’est avec une certaine émotion que Laurent Jacqua termine son récit et laisse place aux multiples questions qu’il a éveillées chez de nombreux étudiants. Après une heure de conférence, les paroles du titre Le bout du tunnel prennent alors tout leur sens :

 

"Avant je m’évadais au pistolet,

Maintenant je m’évade à l’épistolaire"

 

Vous pouvez retrouver des extraits du live de la conférence sur notre Facebook ou bien en apprendre plus sur Laurent Jacqua dans cette vidéo.

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